Apprendre le solfège, c’est apprendre à dire puis à chanter les noms des notes en suivant une partition. Un bon solfégiste est capable de déchiffrer n’importe quelle partition, grâce aux automatismes qu’il a développés : quand il lit do-sol il sait (implicitement) que c’est une quinte et il chante l’intervalle juste ; de même quand il voit une série de notes qui se suivent, formant une gamme, il enchaîne l’automatisme de la montée ou la descente. Idem pour les rythmes. Mais pourquoi fait-il cela concrètement ? A quoi sert le fait de pouvoir chanter les noms des notes ? Il n’y a pas de concerts de solfège. Et quel est le rapport entre cette pratique et la maîtrise d’un instrument, par exemple ?
Pour un professeur de piano avec qui je discutais dernièrement, il faut impérativement pouvoir déchiffrer une partition (en solfégeant) avant de pouvoir la jouer ; d’ailleurs, il s’étonnait que certains élèves jouent plus vite qu’ils ne déchiffrent en nommant les notes. Je veux bien que l’apprentissage avance dans un premier temps autour du fait de pouvoir nommer les notes, mais pourquoi penser que la vitesse à laquelle on joue dépend de la vitesse à laquelle on nomme les notes ? Et si l’association entre le fait de jouer les notes et le fait de les voir suffisait tout simplement pour développer les automatismes ? Pourquoi rajouter une étape supplémentaire ? D’ailleurs, dans d’autres pays le solfège occupe une place moins importante dans l’apprentissage de la musique. Et que faire lorsque les partitions deviennent très complexes, requérant une vitesse d’exécution très élevée ?
Je me demandais ce que cela donnerait pour l’apprentissage des langues : savoir nommer les mots avant de parler ou afin de pouvoir parler. OK, je sais qu’on ne lit a priori pas de partition quand on communique en langue étrangère, mais on a l’impression que cela reviendrait à dire qu’il faut être fort en grammaire pour pouvoir être bon en langues. Or on connaît l’histoire de l’enseignement des langues et on sait que l’accent a été mis sur la grammaire par le passé ; mais on sait également qu’on peut être bon grammairien sans pour autant être bon communicant en langues.
Voilà, je ne connais pas le domaine de la didactique de la musique, et je me dis qu’il doit y avoir des raisons, des explications, des preuves, etc. D'ailleurs, j'imagine qu'il n'y a pas qu'une seule façon de pratiquer le solfège.