C’est « la faute à Sabine » ou c’est « la faute de Sabine » ? J’entends les étudiants répondre en chœur « c’est DE, l’autre c’est incorrect » ! Comme l’annonce l’administrateur du forum du conjugueur, « tout le monde connaît la célèbre phrase de Victor Hugo ‘C'est la faute à Voltaire’. Et pourtant ce n’est pas du français correct et on devrait dire ‘c'est la faute de Voltaire’ ». Il s’ensuit une explication sur la différence entre le choix de la préposition. Mais entre ce qu’on devrait dire (cf. la grammaire prescriptive) et ce qu’on dit réellement, les choses paraissent parfois assez contradictoires. Une recherche simple dans Google donne, par exemple, davantage de résultats pour « la faute à » que pour « la faute de » :
Voilà, en FLE la question est de savoir ce qu’on fait de ces nombreux cas où, par nostalgie des règles ou par souci de correction face aux apprenants, on se sent attiré par la forme « correcte ». Et on s’enlise dans des explications qu’on a du mal à comprendre soi-même parfois (sans parler des exceptions ou contre-exemples). Comme le montre le travail sur la compétence sociolinguistique en L2, la vision étroitement grammaticale des données est assez problématique : souvent, il ne s’agit pas d’oppositions correct/incorrect mais de formes véhiculant véritablement un sens du type formel/informel ou oral/écrit (pour faire vite), voire pour désambiguïser certaines informations, etc. Ainsi, par exemple, l’effacement du NE de négation fait partie d’une réelle compétence à développer chez l’apprenant : parfois le NE est maintenu (dans la plupart des écrits, dans des situations orales plutôt formelles, etc.) mais il est absent dans les productions orales ordinaires.
Donc, pour en revenir à « la faute à/de », l’étude descriptive de la langue française montre que les deux formes existent et qu’elles ne sont pas bien analysées si on en reste à l’opposition simple entre correct et incorrect (cf. Leeman-Bouix 1994). Il y a des distributions beaucoup plus fines qui permettent, par exemple, de constater qu’on trouve plutôt « c’est l’anniversaire à qui ? » mais « c’est l’anniversaire de maman » (mais « à maman » est attesté également). En revanche, une construction tout à fait ordinaire en français comme « c’est pas son anniversaire, à maman » paraît franchement problématique avec « de maman ».
Comme le dit le chat de Geluck, je peux avoir une photo de moi qui n’est pas de moi. Mais je peux aussi avoir une photo qui n’est pas de moi mais qui est de moi… Ici, en jouant sur les deux prépositions, les choses auraient sans doute été plus claires!